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L’article expose en termes généraux et en application de la législation actuelle la problématique de l’arrêt du Tribunal administratif fédéral TAF C-8383/2008 rendu le 23 juillet 20141, 2 après une longue suspension de procédure.

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En cas de licenciements collectifs, l’employeur et les travailleurs conviennent dans bon nombre de cas, et obligatoirement depuis le 1er janvier 2014 si les conditions légales de «grande entreprise» sont remplies (art. 335 h – k CO), de plans sociaux. De règle, les prestations des plans sociaux doivent être assumées par l’employeur. Si un employeur a constitué une fondation patronale de bienfaisance pour son personnel, celle-ci ne peut pas prendre en charge les prestations du plan social, à moins que certaines prestations soient de naturede la prévoyance professionnelle, qu’elles puissent entrer dans le cadre de son règlement de liquidation partielle / totale et qu’il existe une convention de porte-fort ou de débiteur solidaire pour lesdites prestations engageant la fondation dans le plan social adopté par les parties.

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1. Les fondations patronales de bienfaisance
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1.1 Notion et but
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Les fondations patronales de bienfaisance sont des fondations au sens des art. 80 ss du Code civil (CC), financées exclusivement par les employeurs, en faveur des travailleurs et retraités des entreprises fondatrices. Les prestations discrétionnaires qu’elles servent sont de prévoyance vieillesse, survivants et invalidité ou d’aide pour des buts analogues (p.ex. ponts AVS, rentes transitoires, prestations uniques de soutien pour cause de décès, accident) en certaines situations énoncées dans les statuts. Elles ne participent cependant pas à l’application du régime de l’assurance obligatoire en matière de prévoyance professionnelle selon la loi fédérale du 25 juin 1982 sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (LPP)3 et ne sont dès lors pas inscrites au registre de la prévoyance professionnelle4. Les bénéficiaires n’ont envers lesdites fondations que des expectatives de prestations dans le cadre d’états de fait définis statutairement et de cas de restructuration économique. Compte tenu de la nature des prestations discrétionnaires allouées en rapport avec les risques de vieillesse, survivants et invalidité, elles sont néanmoins des institutions «servant à la prévoyance» expressément visées par l’art. 61 LPP5 et de ce fait et en raison aussi du fait qu’elles sont exemptées sur le plan fiscal6, elles sont soumises à l’art. 89 a al. 6 CC pour nombre d’aspects de leur administration compatibles avec la nature non réglementaire de leurs prestations, dont notamment leur surveillance, l’affectation de leurs fonds et, cas échéant, leur liquidation partielle / totale7.

Le but des fondations patronales de bienfaisance servant à la prévoyance doit clairement indiquer la vocation de l’institution au sens de l’art. 61 LPP afin de pouvoir bénéficier de l’exonération fiscale au sens de l’art. 80 LPP. Elles ne peuvent du fait de leur but et de leur exemption fiscale effectuer des prestations qui relèveraient par nature de l’employeur8. Dans leurs activités elles doivent respecter les règles de la bonne foi, l’interdiction de l’arbitraire, le principe de l’égalité de traitement et ne pas commettre d’abus de droit, principes qui trouvent application en droit privé des fondations9.

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1.2 Administration et octroi discrétionnaire de prestations
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Le conseil d’une fondation patronale a un large pouvoir discrétionnaire dans le cadre de l’activité de la fondation et de l’octroi de prestations non réglementaires versées aux bénéficiaires selon les statuts de l’entité10. Mais le conseil ne dispose toutefois pas d’un pouvoir entièrement discrétionnaire en matière d’attribution de prestations, plus généralement d’affectation de sa fortune au but de prévoyance. L’autorité de surveillance exerce un contrôle conformément à l’art. 84 al. 2 CC11. Le conseil de fondation est lié par les principes généraux précités12 qui constituent les bases d’appréciation de l’autorité de surveillance qui se doit toutefois de respecter le principe d’autonomie de la fondation13.

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1.3 Cercle des bénéficiaires
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Le cercle des bénéficiaires des fondations patronales est défini par son acte constitutif ou ses statuts. Il est de règle les salariés et retraités de l’entreprise fondatrice. En cas de restructuration de l’entreprise fondatrice impliquant une liquidation partielle de son institution de prévoyance professionnelle (cf. les art. 53b ss LPP), le principe selon lequel les fonds libres de ­l’institution de prévoyance suivent le personnel s’applique de règle également aux fondations patronales dans le cadre d’une liquidation partielle / totale14 à moins de prestations compensatrices de la part notamment de l’employeur énoncées comme telles en lieu et place de celles de la fondation patronale. Il sied de relever qu’en matière de liquidation partielle et totale les principes applicables aux institutions de prévoyance du régime LPP et de la prévoyance sur-obligatoire sont, de règle, applicables du fait que les salariés et retraités sont les seuls destinataires de ces institutions. En particulier ces fondations doivent avoir adopté un règlement de liquidation partielle / totale15.

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1.4 Affectation de la fortune
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La fortune d’une fondation patronale ayant un but de prévoyance ne peut qu’être affectée à des fins de prévoyance, la fondation ne peut prévoir d’autres fins. Les fonds ne peuvent en aucun cas être utilisés aux fins de financer des prestations dues par l’employeur du fait des contrats de travail ou résultant d’un plan social, qui par nature relèvent des obligations de l’employeur (indemnités de départ, salaires sur quelques mois, différentiels salariaux sur une période donnée n’ayant pas de but de prévoyance, aides financières au déménagement et de formation professionnelle, etc.) en raison de motifs fiscaux16. Plus généralement une fondation patronale de prévoyance ne peut affecter ses fonds à des buts d’agrément de son personnel (financement d’un centre sportif, de lieux de vacances, etc.)17.

Cas échéant, s’il est fait recours aux ressources d’une fondation patronale, ou aux fonds libres d’une institution de prévoyance professionnelle, pour le financement de prestations dans le cadre de la mise en œuvre d’un plan social18, le but de prévoyance des prestations doit être rempli (par ex. s’agissant du financement d’un pont AVS ou d’améliorations de prestations ­de prévoyance) et les parties concernées (employeur, représentations des salariés, syndicats, directions [paritaires] des institutions de prévoyance) doivent clairement établir selon les règles de transparence les modalités et l’étendue du financement. Ceci résulte du fait que l’employeur ne jouit pas d’une totale liberté ­discrétionnaire quant à l’utilisation des fonds constitués par affectation fiscale privilégiée et dont les destinataires sont exclusivement ses salariés et retraités, et non lui-même (par substitution de débiteur de prestations versées aux salariés19), ce qui constituerait un abus de droit à caractère fiscal20.

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2. Les plans sociaux en cas de licenciements collectifs
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2.1 Notion et principes
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Les procédures de licenciements collectifs intervenant dans des entreprises d’une relative ou certaine importance s’accompagnent généralement, obligatoirement depuis le 1er janvier 2014 selon les art. 335 h – k CO si certaines conditions sont remplies (entreprise comptant en moyenne 250 travailleurs21, licenciement de 30 travailleurs22 dans un délai de 30 jours23 pour des motifs de gestion non inhérents à leur personne), d’un plan social, lequel n’est pas, quant au fond, régi par la législation24. Selon l’art. 335 h al. 1 CO le plan social est une convention par laquelle l’employeur et les travailleurs fixent les moyens d’éviter les licenciements, d’en limiter le nombre ou d’en atténuer les conséquences. L’al. 2 de cette disposition précise qu’il ne doit pas mettre en danger l’existence de l’entreprise.

Selon l’art. 335 k CO les dispositions relatives au plan social ne s’appliquent cependant pas en cas de licenciement collectif effectué pendant une procédure de faillite ou une procédure concordataire qui aboutit à la conclusion d’un concordat ordinaire ou par abandon d’actifs. Si un cas de faillite ou de concordat précité survient après l’adoption du plan social, celui-ci reste néanmoins valide et ne saurait faire l’objet d’une action révocatoire selon les art. 285 ss de la loi fédérale du 11 avril 1889 sur la poursuite pour dettes et la faillite (LP)25, 26.

L’art. 335 i CO instaure une obligation de négocier pour les grandes entreprises avec une obligation de résultat27. Selon l’art. 335 j CO, si les parties ne parviennent pas à s’accorder sur un plan social, il y a lieu de saisir un tribunal arbitral, celui-ci arrête alors un plan social obligatoire.

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2.2 Contenu
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Les prestations d’un plan social tendent à l’allocation de prestations volontairement offertes par l’employeur ou négociées avec un syndicat, la représentation des travailleurs, ou les travailleurs directement en vue d’atténuer les conséquences économiques d’un licenciement collectif pour motifs économiques28. Il porte sur des aides diverses et des moyens financiers généralement directement utilisables. Les prestations résultant d’un plan social doivent être établies, de règle, conformément au principe de l’égalité de traitement qui interdit arbitraire et discrimination. Ce qui signifie que les critères d’allocation de prestations doivent être définis de manière objective en traitant de manière égale les travailleurs qui se trouvent dans une situation comparable et de manière différenciée ceux qui se trouvent dans des situations économiques d’âges, d’ancienneté, de position hiérarchique, de statut salarial, de statut familial différents29.

Le contenu d’un plan social fait l’objet en pratique d’un document écrit dont les prestations sont diverses. Son contenu est laissé à la libre volonté des parties contractantes. Il n’existe pas de plan social type du fait de leurs grandes diversités et de leurs contenus laissés à l’accord des parties. Le plan social s’inscrit dans les modalités d’assistance de l’employeur dont on peut économiquement attendre un soutien financier dans le cadre d’une restructuration30. Le plan social peut comprendre par exemple des prestations portant sur une assistance au réemploi et à la formation professionnelle, des modalités de résiliation anticipée du contrat de travail favorables aux reclassements des travailleurs, des aides matérielles au déménagement, le paiement de différentiels salariaux pendant un certain temps, le paiement d’indemnités de licenciement en fonction de l’âge, de la situation familiale et des années de service, le paiement de ponts AVS, un plan de retraites anticipées, une prolongation de l’assurance-accident de 180 jours à charge de l’employeur31.

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2.3 Nature juridique
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La nature juridique des plans sociaux dépend des parties contractantes: d’une part, l’employeur, et, d’autre part, les associations de travailleurs liées par une convention collective32 ou la représentation des travailleurs ou directement les travailleurs à défaut de représentation des travailleurs (l’art. 335 i al. 2 CO énonce les parties contractantes dans un ordre de préséance exclusive33)34.

Ainsi:

  • S’il est négocié et conclu par l’employeur ou une organisation patronale avec une association de travailleurs, telle qu’un syndicat, il constitue une convention collective de travail (CCT) au sens de l’art. 356 CO35.
  • S’il est conclu avec une représentation des travailleurs instituée conformément à la loi fédérale du 17 décembre 1993 sur l’information et la consultation des travailleurs dans les entreprises36, laquelle ne dispose pas de la personnalité juridique, il est un engagement bilatéral obligatoire assimilable à un règlement d’entreprise et fait partie intégrante du contrat individuel de travail de chacun des travailleurs, duquel l’employeur et les travailleurs représentés peuvent déduire des droits et des obligations37.
  • S’il est conclu par une délégation librement élue de travailleurs conformément à l’art. 37 al. 4 de la loi fédérale du 13 mars 1964 sur le travail dans l’industrie, l’artisanat et le commerce (LTr)38, sur la base d’une délégation de compétence prévue dans une CCT, il prend la forme d’un règlement d’entreprise une fois rendu public, conformément à l’art. 39 al. 2 LTr, et ses dispositions complètent les contrats individuels de travail39.
  • S’il est conclu directement avec les travailleurs dans le cadre de l’art. 335 i let. c CO, il s’applique à tous les travailleurs concernés40. Sa qualification juridique est dès lors similaire à celle de l’accord conclu avec une représentation des travailleurs41.

Enfin le plan social peut également résulter d’un engagement unilatéral de l’employeur. Dans ce cas ses dispositions, si elles sont acceptées par les travailleurs, font partie intégrante de leur contrat individuel de travail42.

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2.4 Mode d’interprétation
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Dans tous les cas, le plan a un effet normatif et les travailleurs peuvent alors faire valoir des prétentions fondées sur le plan directement contre leur employeur43. Sa nature juridique a principalement des effets quant aux modalités d’interprétation du plan social, lequel s’interprétera en tant que convention collective, soit, comme une loi, en tant que cadre normatif, ou en tant que dispositions contractuelles accessoires aux contrats individuels de travail44. La distinction doit toutefois être relativisée dans le sens que l’interprétation selon la volonté doit toujours être compatible avec une interprétation objective45.

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3. Droits à des prestations d’une fondation de prévoyance ou de bienfaisance en relation avec ­un plan social
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3.1 Principe
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Un plan social peut avoir pour conséquence de faire naître des droits de prévoyance professionnelle dont les conditions d’octroi sont fixées par le règlement de la caisse de pensions dès l’instant où le travailleur opte pour être mis au bénéfice d’une retraite anticipée46. Les prestations qui s’ensuivent, vu l’anticipation de la retraite prise, seront moins élevées en principe que les prestations ordinaires de prévoyance. A cet égard le plan social peut prévoir des compensations s’inscrivant dans le cadre de prestations de prévoyance versées par l’employeur ou éventuellement par une fondation de prévoyance ­ou patronale si une convention de porte-fort (art. 111 CO) – ou de débiteur solidaire (art. 143 ss CO) – a été insérée dans le plan social47, 48 et que les prestations versées soient compatibles avec le règlement de liquidation partielle / totale de la fondation, laquelle doit avoir un tel règlement49. Mais dans tous les cas un plan social ne peut prévoir le versement de prestations par un fonds patronal de bienfaisance qui par nature ressortissent aux obligations de l’employeur50.

A défaut de l’insertion dans le plan social d’un engagement solidaire (art. 143 ss CO) ou d’une convention de porte-fort (art. 111 CO), se pose la question de la légitimation matérielle du paiement d’un tiers non connu lors de la négociation et conclusion du plan social. Si le paiement d’un tiers (par exemple un riche actionnaire) est sans conséquence sur les droits et expectatives des travailleurs et rentiers, il est manifeste que le paiement par un tiers substitué ressortit à la liberté contractuelle de l’employeur et du tiers payeur. Si le paiement par le tiers substitué affecte les droits et les expectatives des travailleurs et rentiers, comme c’est le cas si le paiement des prestations du plan social intervient par les fonds libres d’une caisse de pensions ou par une fondation patronale, alors le paiement par le biais de la personne substituée qui était inconnue intervient en violation du plan social, car le paiement diminue, sur une base non ouvertement énoncée et acceptée par les parties contractantes du plan social, les expectatives des travailleurs et rentiers envers leur institution de prévoyance ou patronale.

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3.2 Exclusion de prestations relevant normalement d’un employeur
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Le paiement de prestations par une fondation patronale de prévoyance, normalement dues par l’employeur du fait de la nature des prestations en question (prestations de type salarial et analogue), interviendrait, outre en violation des statuts, de plus en violation des art. 59 al. 1 let. b de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l’impôt fédéral direct (LIFD)51 et 10/al. 1 let. d de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID)52 prévoyant pour les entreprises la déduction à titre de charges ordinaires des versements à des institutions de prévoyance en faveur du personnel de l’entreprise (conformément à l’art. 81 al. 1 LPP) à condition que toute utilisation contraire à leur but soit exclue. Or un paiement de prestations dues par un employeur en sa qualité, bien qu’ayant un but louable d’assistance en période de difficultés économiques, va à l’encontre d’un but exclusivement de prévoyance. Le paiement en lieu et place de l’employeur obligé par le plan social à des prestations découlant du droit du travail viole le principe selon lequel les fonds au bénéfice de déductions fiscales versés aux institutions de prévoyance exonérées selon l’art. 56 let. e LIFD ne peuvent faire retour de quelque manière que ce soit à l’employeur53. Ce principe de non-retour est applicable tant aux institutions de prévoyance enregistrées au registre de la prévoyance professionnelle (art. 48 LPP) qu’aux institutions non enregistrées, telles de financement et de bienfaisance de type patronal, du fait de l’exonération desdites fondations découlant de leur but de prestations de prévoyance professionnelle. L’exonération des fondations patronales est justifiée par le fait que leur fortune est assimilée à la fortune libre des institutions de prévoyance54 sous réserve toutefois d’une grande liberté discrétionnaire d’affectation dans le cadre statutaire car les fonds existant n’ont été constitués que par l’employeur55.

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4. Prise en compte conjointe des prestations de prévoyance et d’un plan social
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Un licenciement collectif d’envergure peut, outre le fait de donner lieu à un plan social destiné à amoindrir les conséquences économiques des personnes concernées, entraîner une liquidation partielle ou totale de l’institution de prévoyance de l’entreprise et, cas échéant, de son institution patronale. Dans ces circonstances, il est admissible de tenir compte des prestations versées ou qui pourraient être versées tant par l’institution de prévoyance professionnelle, la fondation patronale et l’employeur en application d’un plan social pour certaines catégories de travailleurs, préretraités, voire retraités. Dans ce cadre il est ainsi possible de privilégier ou priver, cas échéant, certaines catégories de bénéficiaires de prestations de l’une ou l’autre source compte tenu de l’ensemble des prestations versées dans le respect du principe de l’égalité de traitement en application de critères pondérés entre les salariés licenciés, les salariés maintenus éventuellement à d’autres conditions d’engagement et les salariés partis en retraite anticipée56. En d’autres termes, des prestations de sources diverses peuvent être coordonnées en application du principe d’égalité de traitement57. Le Tribunal fédéral a par ailleurs précisé que l’intérêt à la pérennité de l’institution de prévoyance pour le personnel restant ne primait pas sur les prétentions à l’égalité de traitement du personnel sortant par rapport au personnel restant, les deux principes coexistant au même rang58.

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Conclusion
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En tant que tel un plan social peut prévoir le versement de prestations ayant un but de prévoyance stricto sensu (prestations de vieillesse, d’invalidité et allouées aux survivants) financées par les fonds libres d’une institution de prévoyance professionnelle ou financées par une fondation patronale pour autant que les parties au plan social en aient convenu ainsi par une convention de porte-fort au sens de l’art. 111 CO, ou de débiteur solidaire au sens des art. 143 ss CO, et que les prestations versées s’inscrivent ­dans le cadre du règlement de liquidation partielle / totale de la fondation.

Deux conditions doivent toutefois être remplies. La première condition (qui comporte deux volets) est que, d’une part, les prestations relèvent de la prévoyance stricto sensu, car à défaut les prestations versées le seraient contrairement au but de prévoyance de la fondation, et, d’autre part, qu’elles soient compatibles avec le règlement de liquidation partielle / totale. La deuxième condition est que l’accord de financement de prestations de prévoyance stricto sensu procède d’une convention de porte-fort ou de débiteur solidaire passée par toutes les parties au plan social. En effet, à défaut de cet accord signé, les travailleurs et rentiers, bénéficiaires exclusifs de la fondation patronale, seraient lésés par une diminution d’expectatives de droits pour le futur sans avoir été préalablement informés de cette incidence pro futuro couplée avec le plan social59.60

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  1. L’auteur a été le greffier rédacteur de l’arrêt C-8383/ 2008 de sorte que certains passages dudit arrêt et de cet article présentent des similitudes. L’auteur n’engage que lui-même dans cette publication.
  2. L’arrêt a été rendu compte tenu de la situation de droit avant l’entrée en vigueur le 1er janvier 2014 des art. 335 h – k CO et avant l’ATF 138 V 346 du 30 août 2012 ayant établi que les fondations patronales de bienfaisance doivent comme toutes les fondations de prévoyance professionnelle adopter un règlement de liquidation partielle / totale. Le présent article prend en compte l’état actuel de la législation et de la jurisprudence. Voir la note 60.
  3. LPP, RS 831.40.
  4. Cf. l’art. 48 al. 1 LPP.
  5. Jacques-André Schneider, in: Schneider / Geiser / Gächter (Edit.), LPP et LFLP, Berne 2010, Intro, n° 216 ss.
  6. Voir infra 3.2.
  7. Voir notamment l’ATF 138 V 346 et l’arrêt du TF 9C_36/2012 du 3 décembre 2012 consid. 2.1 et 5. Relevons sur un plan plus général que les fondations de prévoyance professionnelle offrant les prestations du régime LPP obligatoire relèvent de la LPP uniquement. Les fondations qui offrent des prestations sur-obligatoires relèvent de l’art. 89a CC qui renvoie à de très nombreuses dispositions de la LPP. Les fondations dites englobantes (régime légal LPP et régime sur-obligatoire) sont régies par la LPP et l’art. 89 a CC. Les fondations patronales relèvent aussi de l’art. 89 a CC mais l’al. 6 ne leur est pas entièrement applicable du fait de la nature discrétionnaire des prestations versées. Suite à l’initiative parlementaire «Permettre aux fonds de bienfaisance de jouer leur rôle» (11.457) du 17 juin 2011, la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil national a produit son rapport le 26 mai 2014. Elle propose notamment de modifier l’art. 89a CC afin que soit clairement énoncées quelles sont les dispositions de la LPP applicables aux fonds patronaux de bienfaisance (FF 2014 5929).
  8. Franziska Bur Bürgin, Wohlfahrtsfonds, Vorsorgeeinrichtungen im luftleeren Raum? in: Hans-Ulrich Stauffer [Edit], Berufliche Vorsorge im Wandel der Zeit, Zurich 2009, p. 74.
  9. ATF 119 Ib 46 consid. 4c; ATF 110 II 1436 consid. 4; arrêt du TF 2A.402/2005 du 15 février 2006 consid. 3.2; Bur Bürgin, op. cit., p. 80 ss.
  10. Cf. l’arrêt du TF 2A.402/2005 cité consid. 3.2 et les réf.
  11. Schneider in: LPP et LFLP, Intro n° 219.
  12. Supra 1.1 in fine.
  13. Cf. l’ATF 108 II 352.
  14. ATF 110 II 436; voir ég. Schneider in: LPP et LFLP, Intro n° 221; avis moins restrictif: Isabelle Vetter-Schreiber, Gleichbehandlung bei Teil- und Gesamt­liquidationen in: Hans-Ulrich Stauffer [Edit.], Beruf­liche Vorsorge im Wandel der Zeit, Zurich 2009, p. 279, 292.
  15. Voir l’ATF 138 V 346 consid. 6.
  16. Voir infra 3.2.
  17. Si une entreprise souhaite affecter des fonds à de tels buts elle peut le faire directement ou par le biais d’une fondation patronale en faveur du personnel non de prévoyance et, de ce fait, non exemptée d’impôts.
  18. Cf. infra 3.
  19. En reportant à la fondation le paiement de prestations que l’employeur devrait payer, il s’attribuerait un versement équivalent.
  20. Cf. Schneider in: LPP et LFLP, Intro n° 223 et art. 1 LPP n° 11.
  21. Selon les données qui découlent du recensement des entreprises de 2008, utilisées pour le message du CF du projet de loi, la réglementation touchera 1154 des 312 861 entreprises privées recensées, soit 0,37% de toutes les entreprises (Feuille fédérale [FF] 2010 5871, 5913). Rémy Wyler / Boris Heinzer (Droit du travail. 3e éd., Berne 2014, p. 559) relèvent que la référence aux 250 travailleurs est faite en rapport avec l’établissement et non l’entreprise, de même qu’aussi la référence aux 30 travailleurs. Ces auteurs font référence à l’art. 335d CO et au BO 2013 N 625 (Schwaab). Voir ég. l’ATF 137 III 27 qui précise en référence à l’art. 335d CO que lorsque plusieurs établissements font partie de la même entreprise, l’existence d’un éventuel licenciement collectif se détermine, sauf exception, par établissement, et qu’en présence d’un groupe de sociétés il faut examiner chaque entreprise membre.
  22. Voir la note 21.
  23. Les licenciements étalés dans le temps mais dictés par les mêmes motifs sont additionnés (cf. l’art. 335i al. 2 CO). Sont concernés les licenciements visés par une même décision économique (FF 2010 5871, 5913; Wyler / Heinzer, op. cit., p. 559).
  24. ATF 133 III 123 consid. 4.3; Christine Sattiva Spring, Quelle nature juridique pour le plan social? in: Rémy Wyler [Edit], Panorama en droit du travail, Berne 2009, p. 247 s., 250.
  25. LP, RS 281.1.
  26. FF 2010 5871, 5914; Wyler / Heinzer, op. cit., p. 563.
  27. FF 2010 5871, 5913.
  28. ATF 133 III 213 consid. 4.3, ATF 132 III 32 consid. 6.1; Sattiva Spring, op. cit., p. 248; Wyler / Heinzer, op. cit., p. 556.
  29. Wyler / Heinzer, op. cit. p. 557 s.
  30. Cf. Arthur Andermatt et alii, Droit collectif du travail, Bâle 2010, p. 150, se référant à l’ATF 132 III 115 et à l’arrêt du TF 4C.77/2007 du 26 juin 2007 consid. 3.2 non publié à l’ATF 133 III 512.
  31. Cf. Wyler / Heinzer, op. cit., p. 557; Andermatt et alii, op. cit., p. 150; Commentaire romand CO I [CR-CO I], 2e éd., Bâle 2012, Aubert, art. 335f n. 10; ATF 133 III 213 consid. 4.3, 130 V 18 consid. 3.2 i.f. et les réf.
  32. L’employeur lié en qualité de partie à une convention collective de travail (CCT) est tenu de négocier avec le ou les syndicats contractants. La qualité de partie de l’employeur est généralement le cas dans une CCT d’entreprise. Ce n’est généralement pas le cas si la CCT est de branche. Ce n’est pas le cas si l’employeur est soumis à une CCT qui a fait l’objet d’une extension prononcée conformément à l’art. 4 de la loi fédérale du 28 septembre 1956 permettant d’étendre le champ d’application de la convention collective de travail (LECCT, RS 221.315.211) ou s’il s’y est soumis individuellement (Wyler / Heinzer, loc. cit.).
  33. FF 2010 5871, 5913 – 5914; voir les développements de Wyler / Heinzer, op. cit., p. 560 s. et 564 s.
  34. Voir ATF 133 III 213 consid. 4.3.1, 4.3.2 et 6.1; Wyler / Heinzer, op. cit., p. 564 s. et 969 ss; Sattiva Spring, op. cit. p. 254 ss, 271 ss; Andermatt et Alii, op. cit., p. 149 s.
  35. ATF 133 III 213 consid. 4.3.1, ATF 130 V 18 consid. 2.3; CR CO I, Aubert, art. 335 f n. 10; Wyler / Heinzer, op. cit., p. 564.
  36. Loi sur la participation des travailleurs, RS 822.14.
  37. CR CO I, Aubert, art. 335 f n. 10; Wyler / Heinzer, op. cit., p. 565.
  38. LTr, RS 822.11.
  39. Wyler / Heinzer, op. cit., p. 565.
  40. FF 2010 5871, 5914.
  41. Wyler / Heinzer, op. cit., p. 566.
  42. CR CO I, Aubert, art. 335 f n. 10; Wyler / Heinzer, op. cit. p. 566; ATF 133 III 213 consid. 4.3.3.
  43. Wyler / Heinzer, op. cit., p. 565 s., 970; Sattiva Spring, op. cit., p. 255.
  44. Voir les ATF 133 III 213 consid. 4.2, ATF 130 V 18 consid. 4.2; Wyler / Heinzer, op. cit., p. 567 et les réf.; Sattiva Spring, op. cit., p. 269.
  45. ATF 133 III 213 consid. 5.2; Andermatt et Alii, op. cit., p. 151.
  46. Wyler, op. cit., p. 485; Andermatt et alii, op. cit. p. 150 note 99; Sattiva Spring, op. cit., p. 259.
  47. On notera qu’une convention de porte-fort (art. 111 CO) est souvent insérée dans un plan social dont l’employeur fait partie d’un groupe, prévoyant l’engagement cas échéant de la société mère qui se porte ainsi garante de l’exécution du plan social par l’entreprise (CR CO I, Aubert, art. 335f n° 10).
  48. Wyler / Heinzer, op. cit., p. 567; ATF 131 III 606 consid. 4.2.2.
  49. ATF 138 V 346.
  50. Cf. Bur Bürgin, op. cit, p. 84, 86; à noter que les exemples de financement de prestations d’outplacement et de formation proposées par Bur Bürgin (p. 86) paraissent trop larges si la fondation est au bénéfice d’une exemption fiscale.
  51. LIFD, RS 642.11.
  52. LHID, RS 642.14.
  53. Cf. Commentaire romand, Yersin / Noël [Edit.], Impôt fédéral direct, 2008 [CR LIFD], Danon / Laffely Maillard, art. 52 n° 12; CR LIFD, Noël, art. 27 n° 37 i.f., 38; CR LIFD, Laffely Maillard, art. 56 n° 43, 47.
  54. CR LIFD, Lafelly Maillard, art. 56 n° 47.
  55. Schneider in LPP et LFLP, Intro, n° 220.
  56. Arrêts du TF 2A.501/2002 du 20 mars 2003 consid. 5.3, 2A.402/2005 du 15 février 2006 consid. 3.2; Sattiva Spring, op. cit., p. 259; Nathalie Bornoz in: Wyler (Edit.), Panorama en droit du travail, Berne 2009, p. 718.
  57. Voir l’arrêt du TF 2A.46/2007 du 20 septembre 2007 et l’ATF 133 III 512.
  58. Arrêt du TF 2A.699/2006 du 11 mai 2006.
  59. C’est la solution retenue par l’arrêt du TAF C-8383/2008 du 23 juillet 2014 consid. 9.
  60. Un recours contre l’arrêt du TAF C-8383/2008 a été interjeté fin août 2014 auprès du Tribunal fédéral par la fondation de bienfaisance concernée. Il porte sur des aspects propres à la cause, l’étendue de l’autonomie de la fondation, la notion de travailleur en situation de nécessité et discute la nécessité d’une convention de porte-fort ou de débiteur solidaire de la fondation de bienfaisance dans le cadre d’un plan social dont certaines prestations sont payées par la fondation de bienfaisance de l’employeur signataire du plan social.
Date